Victor Segalen  A Dreuz an Avor en août 1899

Le petit train, cahoteux et lent nous dépose, vingt kilomètres plus loin, en face de deux omnibus, dont les conducteurs, avisant ma roue impotente et mollasse, se m'arrachent, en me jetant à la tête, comme un défi, les 6 kilomètres qui séparent Le Huelgoat de la gare qui prétend le desservir.

Certes, rien d'immérité, à la réputation de ce coin si spécial, luxuriant de végétation, crevassé d'abîmes vert profond où bruissent d'invisibles torrents. De larges routes en corniches, blanches et soignées comme des boulevards, courent entre des bois de sapins denses, opaques. C'est le paysage de montagne presque type, aux tons de chromos, acceptable en nature, peu désirable à noter sur la toile.

Un peu au hasard, nous prenons de nuit, suivant notre habitude, un avant-goût de ce que le grand jour nous détaillera le lendemain ; de la pénombre profonde sourdent lourdement des blocs immenses, d'autres, en pleine lumière, arrondissent leurs formes géantes, et, tamisant, grillageant la clarté sélénique, les sapins, en foule, superposent à l'infini leurs accents circonflexes feuillus.

De bonne heure, au jour, nous trottons derrière un tout petit guide, éveillé, tout menu... C'est une promenade circulaire à grande allure, et suivant l'inévitable itinéraire : le chaos, d'abord, conglomérat étonnant de blocs éboulés derrière un vieux moulin... La pierre branlante, dont les cent tonnes oscillent avec des grâces éléphantines sous quelques poussées rythmées...

Il y a vingt ans, frappé de l'inutilité de tous ces gros cailloux, on eut la suave idée de les exploiter comme pierre à bâtir, et, avec une pleine désinvolture, on se mit à les débiter à la scie, à les émietter à la poudre... La pierre branlante faillit y passer, et une partie du chaos se transforma en jolis petits moellons plus utiles, évidemment, et surtout de vente plus facile que les grands blocs primitifs.

Il fallut une intervention énergique pour arrêter cette mutilation.

Mais la plaie est là, cassure blanche, déflorant le site, comme un os brisé traversant les chairs. Et les coups de pioche ne se taisent pas. Peut-être essaient-ils, les malheureux, de retaper leurs cailloux disloqués?

Plus loin, heureusement, tout est intact: le «Ménage de la Vierge», série d'empreintes en creux, se cache mystérieusement au fond d'un amas de roches, tandis que tout en bas, tintent avec un timbre clair comme du métal, les petites cascades de la «rivière d'Argent».

Puis, nous voilà en pleine forêt, et vaste, et touffue : une appétissante salade de grands arbres, de taillis, de ruisselets érodant de gros rochers, faufilés à fleur de terre, et s'épanouissant brusquement au grand jour d'une clairière encadrée de sous-bois giboyeux, et cela durant des kilomètres.. La «Chambre d'Arthus», le «Trou aux Sangliers», le «Gouffre», énumère le petit guide...

En somme, des sites de montagne, et dignes de la Suisse ou des Vosges, m'affirme, dans l'omnibus, mon compagnon d'Impériale; mais, au reste, peu séduisants pour un peintre. Infailliblement, il serait conduit à ne produire qu'une de ces truculentes affiches de bains de mer ou de voyages circulaires exhibées dans les gares entre un distributeur automatique et un horaire de chemin de fer, dont elles partagent la valeur esthétique...

Et malgré ce pimpant décor, on se reprend, au long du retour, à rêver encore du vieux peintre, vieux de toute la sénilité d'un très vieux peuple, dont le symbolisme, le fantastique et les rêves, ont trouvé en lui leur expression imagée, leur évocation poétique, toute de nuances, de demi-teintes, de charme morose et dolent.

L'EXPLOITATION DES BOULES GRANITIQUES AU HUELGOAT.Louis CHAURIS  «Les habitants du Hüelgoat crient qu'on leur laisse leurs rochers..» Sans doute « Vox damans in deserto ».


LA STELE DE VICTOR SEGALEN  (Victor Segalen 1878-1919) . Au Kastell- ar gwibell  du  Gouffre

Pierre cachée dans les broussailles, mangée de limon, profanée de fientes, assaillie par les vers et les mouches, inconnue de ceux qui vont vite, méprisée de qui s'arrête là,

Pierre élevée à l'honneur de ce Modèle des Sages, que le Prince fit chercher partout sur la foi d'un rêve, mais qu'on ne découvrit nulle part

                             Table de sagesse, Stéles, Victor Ségalen, 1912.

 

Cette stèle dédiée à un poète de la nature à ce nietzschéen comme le dit bien  Michel Onfray ,elle n' est pas en granit bleu du Huelgoat comme  est  selon ses volontés sa tombe au cimetière de Crois ar go  et son épitaphe en granit du Labrador noir des cimetières  .Elle me choque ! Ringard cette stèle !

Pour Michel Onfray, Victor Segalen était un homme libre, un personnage qui n'obéissait pas aux modes. Le philosophe pense aussi que le poète, mort ici le 21 mai 1919 est très actuel, par son côté païen ou encore amoureux de la diversité

 

https://www.tebeo.bzh/replay/173-linstant-t-du-24-05-2019-special-victor-segalen/10475509?fbclid=IwAR2k6pDX93ddXvjVhGh-PtGVfVpoJGdCfvSyhewlRtPWCY07xdAmOmbXlPg

https://www.youtube.com/watch?v=z_qo1msHmjo

https://www.youtube.com/watch?v=FPpokH8XCJE

https://www.youtube.com/watch?v=E99Zya8pJPA

La mort de Victor Segalen Un point de vue médical * par Dominique MABIN **

https://video-streaming.orange.fr/actu-politique/vie-et-mort-des-marquises-par-michel-onfray-1-victor-segalen-un-guide-nietzscheen-VID0000002aNyf.html

 

Suicide ou un accident. au Kastell Ar  Gwibell: Haut lieu de sacrifices humains dans notre tradition populaire et des suicides ! A cette époque, la famille d'un suicidé n' avait pas le droit de passer à l' église ,le passe droit était un don à l évêché comme cela était passé pour le suicide de mon grand- père paternel.

 

  Le registre des décès de la commune du  Huelgoat. dressé le 24 mai 1919  à neuf heures, "" décédé accidentel  le  23 mai  1919  à 17 heures"" d' après  sa famille . On était  sans nouvelle de lui  depuis le matin du  21 mai il était parti .de l' hotel d' Angleterre où il logeait .  

Mort pour la France Victor SEGALEN le 23 mai 1919 au HUELGOAT Je vais demander que son nom soit sur le monument aux morts du Huelgoat

 


La  tombe de Victor  Segalen au cimetière communale de Croaz ar go du Huelgoat, une simple stèle en granit brut du Huelgoat  

 

  Je trouvais magnifique cette tombe moussue, sans épitaphes et son chêne tordu qui poussait contre celle ci de ce poète inconnu pour nous tous du pays qui fut retrouvé mort au chateau du Gouffre. La magie de cette tombe a disparu depuis !!

http://bertrandbeyern.fr/spip.php?article722

Selon ses volontés, il est inhumé au nouveau cimetière de la commune de Crois-ar-go  où un petit chêne vert ombrage sa tombe recouverte d'une épaisse dalle de granit à peine équarrie. La tombe était  face à l' ancienne entrée du cimetière qui était orientée vers  l' Orient  qui chérissait !

 Après avoir arroser les jardinières sur  la tombe de mes parents au  cimetière du Poerop .Pour les 100 ans de la mort officielle mystérieuse au Gouffre le 23 mai 1919 du grand écrivain auteur de Stèles Victor Segalen j’ai déposé un bouquet de genet sauvage en fleurs sur sa tombe vide de fleurs naturelles : sans entretiens pour cet anniversaire de ce grand poète de la nature au cimetière de Crois ar go au Huelgoat .La marchande du Temple de Victor Segalen et ses animations au Pouly le weekend prochain elle ne doit pas savoir où est sa tombe ? Cette stèle couchée de pierre du Huelgoat que nous tous huelgoatains la connaissent bien. .Elle a aucuns respects de la mémoire de la famille des Segalen ?

Sur les traces de Victor Segalen ; Publié sur le Télégramme du 10 janvier 2007

François Tosser doute de la survie du « Petit chêne de Segalen » planté, un jour, par une main inconnue.

Il est au cimetière du Huelgoat une simple pierre tombale, flanquée des restes étonnants d'un chêne moribond, qui risque d'être fort visitée cette année, à l'occasion de la manifestation Lire en fête.

La sépulture, c'est celle de Victor Segalen, et « le chêne », explique François Tosser, « a été planté par un inconnu comme symbole de l'écriture ». Etonnant écheveau des histoires croisées, Victor Segalen n'avait de rendez-vous avec   Le Huelgoat que pour y mourir, seul, au-dessus du gouffre, malade, à 41 ans, un exemplaire de Hamlet posé à ses côtés, le 21 mai 1919. Et pourtant dans sa vie, il eut un autre rendez-vous avec un Breton fugace : Gauguin, décédé trois mois avant son passage. C'est aux Iles Marquises, en effet, qu'il sauvera les derniers croquis du peintre qui vint, aussi, poser un temps ses pinceaux en Bretagne. C'est, d'ailleurs, une toile de celui-ci que Victor Segalen sauve des enchères en 1907 : pas n'importe laquelle, hasard de l'histoire, mais celle d'un « village breton sous la neige ». Homme de la fin du XIX e , c'est à Brest qu'il était né en 1878.
Esprit multipleEsprit multiple, il fut médecin de marine, mais aussi ethnologue, passionné de la Chine, archéologue, écrivain. A l'image de ces esprits, ouverts à toutes les connaissances, il sera, parce qu'il est mort ici - mort naturelle ou suicide, personne ne le sait - au coeur de la prochaine édition de Lire en fête. Ses récits de voyage, son goût de l'extrême Orient, sa largesse d'esprit en feront, aussi, le héros ressuscité du nouveau café librairie « Les stèles » dont le nom est justement celui de l'un de ses ouvrages de poésie les plus connus. © Le Télégramme http://www.letelegramme.fr/ar/viewarticle1024.php?aaaammjj=20070110&article=13456813&type=ar#Fbrh1Q8dCJAqrOAu.99

 

Le petit chêne de Segalen a été enlevé par la commune du Huelgoat lors de la réfection de la tombe qui s'était affaissée de ce poète de la nature  . Au carcher et épitaphes  gravées dessus on l 'a saboté ? 


                                                                                                                    LE  HUELGOAT. 99» ANNIVERSAIRE DE LA MORT DE VICTOR SEGALEN

 

Quand Coatalem fait revivre Segalen

 

«Ségalénien », Emmanuel Macron ? C'est ce qu'il aurait confié être à l'écrivain-voyageur Jean-Luc Coata­lem, alors que celui-ci venait de lui adresser son ouvrage sur Victor Segalen, « Mes pas vont ailleurs » (Stock, Prix Femina Essai et Prix de la Langue française 2017). De fait, le 8 janvier dernier à Xi'an, le Président glissait dans son discours une allusion à l'explorateur brestois : «... Comme un voisin Vic­tor Segalen, venu chercher en Chine les briques et les tuiles de sa poésie et découvrant ici même, à Xi'an, l'odeur fade et riche des siècles enfouis... ». Incidemment, son épouse Brigitte évoquait ce même Segalen en accueillant en France le petit panda dont elle était la marraine.Alors Segalen, auteur en vogue ? On pourrait presque le croire, à la veille d'une année 2019, qui marquera non seulement le centenaire de sa mort mystérieuse, le 23 mai 1919, mais surtout celle de son entrée en Pléiade.« Une véritable consécration, souligne Jean-Luc Coatalem croisé au Huelgoat. Il va se retrouver entre Faulkner, Shakespeare qu'il aimait tant, Conrad et Biaise Cendrars.... Il fait partie des très grands à partir de maintenant. »

Aventurier de l'esprit -

Pour (re) découvrir cet écrivain, l'aborder dans toutes ses complexités, rien de tel justement que le récent ouvrage de Jean-Luc Coata­lem qui le fait revivre. « J'ai essayé, nous dit-il, me réapproprier cet auteur, de le rendre le plus vivant possible, de lui rendre sa part d'humanité, sa part de mystère. » Il a commencé à lire Segalen dans les années 1980 : « Ce personnage ' m'a tout de suite plu. Certes c'est un auteur difficile d'accès, mais le personnage en soi est assez fascinant parce qu'il est multiple. C'est à la fois un aventurier, un intellectuel, un poète...

Un homme d'esprit et de corps. C'est ça que j'aime chez lui. Il est en même temps un intellectuel en mouvement et un aventurier de l'esprit ; pas juste un aventurier géographique. » Éternel voyageur en quête, Segalen l'était. Mais en quête de quoi ? De l'autre ? De lui-même à travers l'autre ? D'une , mais c'est une Chine fantasmée. Il aime la Polynésie. Mais c'est une Polynésie qui n'existe pas. »

Dans ce Maelstrom de périples où il se cherche et se perd parfois, Sega­len a ses ancrages (on brûlerait même d'écrire ici « encrages »). À Brest d'abord : « C'est à la fois sa ville de naissance, sa ville refuge, l'endroit où comme il disait " tant allé, je me reviens ". » Et puis il y a Huelgoat, « un lieu qu'il aime beaucoup. C'est un de ses premiers voyages adolescents et un des premiers textes qu'il a écrit est une description du Huelgoat. C'est un endroit qu'il aime parce qu'il peut s'échapper et aller en forêt retrouver la rivière, les futaies, les arbres et ce silence végétal. Il aime comme il dit " végéter du matin au soir dans la forêt ".» Et Coatalemen  d'ajouter :

« Paradoxalement, c'est à Huelgoat, le lieu de sa mort, que je trouve qu'il est le plus vivant. C'est un lieu assez hanté. »

Suicide accidentel

À propos de cette mortmystérieuse, un journaliste a pu parler un jour de « suicide accidentel ». Suicide accidentel  ... Admirable figure thanatostylistique : victime d'abord' d'un accident, bête, tragique, Segalen se serait laissé aller. Après tout ,laissons venir les lavandières de la nuit... Étrange suicide, assurément, qu'une entaille au niveau du talon. On a connu plus simple, plus rapide ... Mais peut-être moins théâtral. « Je pense, considère JL Coatalement, que si ce n'est pas un suicide, il y a au moins une mise en scène quand il se sent mourir : le fait de marquer un volume de Shakespeare, d'Hamlet précisément, en anglais, de former une sorte de code, de rébus, avec des vers à l'intention de son épouse, le fait aussi d'être en uniforme de marine alors qu'il n'est pas d'activé ; il est en convalescence. Il est au-dessus d'un tertre, sur un petit belvédère, avec l'eau qui passe en dessous ; ça ressemble très étrangement à son poème qu'il avait écrit et qui s'appelait « Édit funéraire ».

D'ailleurs son épouse l'a dit : " C'est exactement le poème qu'il avait écrit il y a quinze ans ". Laissez fumer ce petit village en contrebas... C'est au Huelgoat. Et je dormirai tranquille... Ne cherchez pas à savoir..., ne cherchez pas à venir me voir..., tous les accès sont coupés... C'est exactement ça. Tous les accès sont coupés et d'où il est agonisant, il voit le petit village qui fume. » S'était-il enfin trouvé ? Avait-il à l'ultime seconde donné la réponse à cette question qu'il se posait : « pourquoi suis-je moi et pourquoi fus-je Breton ? » (« Essai sur soi-même »)

Immémoriaux bretons

« À la fin de sa vie, rappelle JL Coata­lem, il se pose la question d'écrire Les Immémoriaux bretons comme il avait écrit en début de carrière " les Immémoriaux " polynésiens. Il disait : je souhaite revenir à l'os ancestral.

Le temps ne lui a pas donné l' occasion  de finir ce livre commencé par une nuit d'opium. En tous cas, de le démarrer vraiment. Il y a quelques feuillets simplement. » «• Cette interrogation sur sa « celtité » est récurrente chez le médecin bres­tois : « Au moment de la publication de " Stèles ", il va écrire une lettre à son père pour lui demander de celtiser son nom, d'enlever l'accent sur le premier e et prononcer Ségalène et non plus Ségalin. Il a demandé à faire sonner la dernière syllabe de son nom et c'est lui rendre hommage que de le faire. » Retour ultime et inachevé en Celtitude comme un éternel retour pour l'ultime instant ?

ADA Le POHER  N° 1160  de la semaine du 23 au 29 mai 2018

https://www.youtube.com/watch?v=5wZUNQd_u1Q

https://www.youtube.com/watch?v=7VEBDfl6vVs


Victor Segalen avait dû déjeuner au bord de la Rivière d'Argent et gravir ensuite le mamelon pour lire et se reposer.

 La fin brutale de Victor Segalen dans la forêt du Huelgoat reste énigmatique. S'agit il d'un accident ou d'un suicide ? Ses biographes ne se prononcent pas. Un regard médical sur la vie et sur les circonstances de la mort de cet écrivain brestois, médecin de Marine, peut-il donner la réponse ? (1)A l'automne 1918, Segalen est victime d'une nouvelle phase dépressive. Il est hospitalisé à l'Hôpital Maritime de Brest puis au Val-de-Grâce pour une "neurasthénie aiguë". Son état ne s'améliore pas, malgré un séjour près d'Alger chez son ami Charles de Polignac. Le 13 avril 1919, il bénéficie d'une prolongation de convalescence de 45 jours. Il gagne alors l'Hôtel d'Angleterre, au Huelgoat, le 27 avril. Sa femme vient le rejoindre à deux reprises les 10-11 et 17-18 mai. Ils se promènent sur les bords de la Rivière d'Argent. Le 20 mai, il écrit ses deux dernières lettres, qu'il ne poste pas, l'une à Yvonne, l'autre à une amie très chère, Hélène Hilpert.Une amie, Jeanne Perdriel-Vaissière, qui séjournait à l'Hôtel d'Angleterre en compagnie de son fils Hervé, apporte un témoignage précieux sur la mort de Victor Segalen. "[Il] est parti, mercredi matin, [21 mai], emportant des sandwiches pour déjeuner dans les bois. Il voulait fuir une bande tapageuse qui s'annonçait à l'Hôtel. A onze heures, il partait, un pique-nique dans sa main droite". Le soir, il n'est pas rentré. Comme il y avait eu un violent orage dans l'après-midi, on pensa qu'il s'était réfugié dans une auberge des environs. "Jeudi midi, rien ; la peur nous prend". Avertie, sa femme Yvonne arriva de Brest le vendredi après-midi. Jeanne Perdriel poursuit : "Autour de la rivière s'agitent ceux qui cherchent, elle [Yvonne] ne s'arrête point, franchit l'eau sur les blocs, s'engage dans un sentier de chèvre. Elle monte, sans une hésitation, dans les broussailles au sommet du gouffre, là-même où, une semaine auparavant, ensemble, ils avaient cherché et trouvé la solitude la plus inaccessible. Il y revenait chaque jour depuis, et seule, elle en connaissait le chemin. Il était là, -mort-. Son manteau est plié  sous lui, son veston de marine est ouvert". Ce témoin précise que Segalen était dans "un creux de verdure, sur le mamelon escarpé qui surplombe le Gouffre [...]. Le corps de Victor est étendu, un pied déchaussé, bandé d'un mouchoir sanglant [...], son Shakespeare à côté ; un peu plus loin, un gobelet qu'il avait dû remplir d'eau pour laver sa blessure [...]. Victor avait dû déjeuner au bord de la Rivière d'Argent et gravir ensuite le mamelon pour lire et se reposer. En montant, il s'est blessé au pied sur une racine sciée en biseau aigu ou quelque roche pointue... Donc, il s'est produit une déchirure saignante, et lorsque s'étant assis, il a voulu se panser, la faiblesse extrême dont il souffrait,particulièrement depuis quelques jours, ne lui a pas permis de terminer le geste ; une syncope est survenue, le sang a coulé [...] la terre en était imprégnée : une mare auprès de lui [...]. Victor s'était installé comme un promeneur qui a chaud [...] avant l'orage de mercredi, il était déjà mort". Cette blessure accidentelle fut la version retenue  par la famille qui refusa l'autopsie. L'enterrement eut lieu le lendemain au cimetière du Huelgoat, après une cérémonie à l'église .Cependant, l'analyse des circonstances de ce décès soulève bien des questions : sur le lieu du drame et sur la découverte immédiate du corps par sa femme, sur la position assise du corps, sur la situation de la blessure et sur l'hémorragie, etc. L'hypothèse d'un suicide est donc probable. Elle est étayée par la situation psychiatrique et psychologique  éprouvante vécue alors par Segalen et par ses échecs affectifs et professionnels. Durant ses études médicales à Bordeaux, il fréquenta d'éminents psychiatres. Il était donc apte à faire le diagnostic de son mal, mais il ne l'a jamais révélé. Outre cet aspect médical, il y avait aussi sa quête du Divin et sa déception de ne pas avoir trouvé de réponse dans le bouddhisme, le taoïsme et le culte maori. La présentation donnée par cette mort est théâtrale. Il fut retrouvé en tenue de médecin de Marine, un exemplaire de Shakespeare ouvert à Hamlet, près de lui, et la photo d'Yvonne sa femme placée à la page qu'ils avaient lue ensemble au m ê m e endroit ; des lettres retirées de leur enveloppe marquaient certaines pages d'Hamlet. Le rapprochement de sa mort avec celle de ses héros, avec les paysages qu'il connut en Chine, avec les tombeaux des empereurs, peut éclairer cette disparition brutale (2). Les circonstances de sa mort restent conjecturales. L'accès mélancolique prolongé est sans doute à l'origine de son suicide. Jusqu'au bout, Segalen a tenu par une mort énigmatique à préserver son mystère. "Il existe en chacun de nous [...] une irréductible et forclose tanièreque [...] nous ne pouvons entr'ouvrir à autrui". http://www.biusante.parisdescartes.fr/sfhm/hsm/HSMx1998x032x001/HSMx1998x032x001x0081.pdf


http://www.briseg.com/le-haut-bois-huelgoat/

J’aime particulièrement cette image de l’arbre qui prend ses racines dans la pierre. Cela me fait penser aux tortues chinoises qu’il décrivait dans l’avant-propos de son livre de poèmes, « Stèles » : Ceux de la  Mare aux fées en contre bas du lieu de sa mort".

Le socle se réduit à un plateau ou à une pyramide trapue. Le plus souvent c’est une tortue géante, cou tendu, menton méchant, pattes arquées recueillies sous le poids. Et l’animal est vraiment emblématique ; son geste ferme et son port élogieux. On admire sa longévité : allant sans hâte, il mène son existence par-delà mille années. N’omettons point ce pouvoir qu’il a de prédire par son écaille, dont la voûte, image de la carapace du firmament, en reproduit toutes les mutations : frottée d’encre et séchée au feu, on y discerne, clairs comme au ciel du jour, les paysages sereins ou orageux des ciels à venir.


https://fr.wikipedia.org/wiki/Victor_Segalen

Médecin de marine, ethnographe et archéologue, Victor Segalen poursuivit, de la Bretagne, à l' Océanie et à la Chine, un voyage passionné par la découverte des voix étrangères à la culture européenne. Après des études

de médecine à Bordeaux, l’officier-médecin est affecté en Polynésie. Il séjourne à Tahiti, en 1903 et 1904, et consulte, à l’occasion d'une escale aux Marquises, les derniers croquis et carnets de Gauguin, décédé trois mois avant son passage.

Il rapporte de Polynésie un roman, les Immémoriaux (1907), un journal et des essais sur Gauguin et sur Rimbaud qui seront publiés longtemps après sa mort (Journal des îles, 1978). Pour son premier séjour en Chine, Victor Segalen soigne les victimes de l’épidémie de la peste de Mandchourie (1908), puis il souhaite s'y installer avec sa femme et son fils (1910). La première édition de Stèles voit le jour à Pékin en 1912. Il entreprend (en 1914) une mission archéologique consacrée aux monuments funéraires de la dynastie des Han. Il en résultera une étude capitale sur la sculpture chinoise, dont il faudra attendre 1972 pour la voir publiée : la Grande Statuaire chinois. 

Il  est trouvé mort ici, à quarante et un ans, le 21 mai 1919,  au kastell-gwibel,,Hamlet à la main.il est enterré au  cimtière du Huelgoat. Il était né à Brest, rue Massillon, le 14 janvier 1878.

Plusieurs universités portent son nom comme celle de Bordeaux 2 et de Brest.

Œuvres : A dreuz an Arvor, 1899.

L’observation médicale chez les écrivains naturalistes, Thèse, Bordeaux, 1901

Les Immémoriaux, (sous le pseudonyme de Max Anély), 1907.Stèles, 1912.

Peintures, Gallimard, 1916.

Parutions posthumes

Orphée-Roi, 1921.René Leys, 1922.Mission archéologique en Chine (en collaboration avec Gilbert de Voisins et Jean Lartigue), 1923-1924.

Équipée. De Pékin aux marches thibétaines. 1929

http://www.bouquins.tm.fr/site/victor_segalen_t1_oeuvres_completes_&100&9782221064627.html

http://www.bouquins.tm.fr/site/victor_segalen_t2_oeuvres_completes_&100&9782221067055.html

 


la mare aux fées  (Bran ruz  Auclair -Deschamps )

    Les ruines de la tour de guet du chateau d' Ahes

Que de vestiges d'une forteresse imposante sur ce mamelon !

Son sommet renferme  des traces de petites cases rectangulaires ( Société d' émulation des Cotes du Nord  Mémoires, 1897 )  Je les ai retrouvé !mais ce long  mur occulté ?

Le Gouffre haut lieu des suicides en  Bretagne

Il s'interrompt alors pour saluer un nouveau venu, un voisin. C'est Dédé, un jeune garçon de treize ans, petit, râblé et vif, et qui prendra plus tard le pseudonyme de « R.T.F. » dans ses représentations magiques. Bon, s'exclame alors Pierre-Marie. On va pouvoir y aller. Dédé connaît la route. Vous n'avez qu'à garder la maison, fait-il à Gab et Eutrope. Je vous ramènerai ce soir à Scrignac. Nous embarquons donc dans l'imposante traction avant noire, Dédé devant, à côté du chauffeur et moi derrière. Nous descendons la pente, longeons l'étang et prenons la direction de Carhaix à travers la forêt. Pierre-Marie roule toujours lentement et dignement, comme il se doit. Nous passons bientôt près du « gouffre », où la Rivière d'Argent tombe en cascade et disparaît sous les rochers et les arbres. Ce lieu inquiétant nous fait toujours un peu frémir, car de temps à autre un pauvre diable s'y jette pour en finir avec l'exis­tence. D'autres y tombent par imprudence, mais nul n'en sort jamais vivant. Le « Gouffre » est dominé par une butte abrupte et très élevée sur laquelle se dressait autrefois un château-fort : Kastell-ar-Guibel. et la légende raconte que Dahut la diabolique fille de ce bon Gradlon, premier roi de Cornouaille, venait parfois dans ce donjon pour y passer des nuits d'orgie. Puis au matin, comme dernière jouissance, la perverse créature faisait lier et jeter du haut de la tour, dans le « Gouffre », son amant de la veille. Un souterrain secret relierait, dit-on aussi, le fond du « Gouffre » à l'antique cité d'Ys, engloutie à tout jamais sous les flots de la baie de Douarnenez. Je l'ai longtemps cherché, ce tunnel fabuleux, étant enfant, et suis seulement parvenu à découvrir qu'une galerie naturelle peu connue, permettait de descendre tout en bas, au pied de la chute, comblant ainsi en partie mon goût du merveilleux.Dédé nous explique que les cadavres sont entraînés par le courant dans un siphon, avant de déboucher dans une grotte large et spacieuse où ils tournent continuellement dans les remous, ne pouvant en sortir, car la seule issue, d'ailleurs trop étroite, est située tout en haut.Cette caverne inondée a été macabrement baptisée : « la salle de danse ». Les pompiers de Huelgoat, après avoir détourné le cours d'eau, y ont pénétré une fois, à la demande d'une famille, pour rechercher le corps d'un suicidé qu'ils ont d'ailleurs retrouvé en compagnie d'autres ossements d'inconnus...Quelques centaines de mètres plus bas, la rivière reparaît à la lumière du jour et s'élargit, formant la Mare aux Fées où il ne fait pas bon s'aventurer au clair de lune. C'est là, selon les anciens, que les « lavandières de la nuit » viennent effectuer parfois leur lessive funèbre. Si vous les rencontrez, elle vous  demanderont sûrement de les aider à tordre leurs draps mouillés. Alors prenez garde ! il faut connaître le « truc ». Car il y a toujours un « truc », bien entendu. Celui-ci consiste à tourner toujours le drap dans le même sens que votre partenaire, malgré ses sarcasmes et ses  protestations. Et si vous suivez ce conseil, vous aurez la vie sauve. Mais si par malheur et ignorance, vous tordez le drap en sens contraire, comme on le fait habituellement, alors ce drap sera votre suaire. Vous ne pourrez plus le lâcher, et la lavandière maudite vous arrachera les bras et la vie sans pitié.Mon père, travaillant un jour près de cette Mare aux Fées, y trouva un avant-bras humain en état de décomposition avancé. Peut-être s'agissait-il du membre d'une infortunée victime des « lavandières » ; ou peut-être aussi d'un morceau échappé de la « salle de danse » où les cadavres mènent un ballet perpétuel, rythmé par le grondement de la cascade.


 

Le Teuss est un fantôme,un génie des landes et des bois de nos Monts d' Arrée. Il peut prendre toutes sortes de formes, et il aime faire peur aux gens et les tromper. Il ne faut surtout pas se moquer de lui, parce qu'il peut alors se fâcher et devenir dangereux.Le « Teuss » de nos anciens des Monts d’ Arrée se présente sous la forme d'un chien, d'une vache, ou d'un autre animal domestique... Il porte aussi un autre nom breton" Aez-rouant " le démon, le serpent celtique bienfaisant vêtu de blanc, d'une taille gigantesque qui croît encore quand on l'approche ; vous ne le voyez que dans les carrefours, les gués, les passages de rivières de minuit à deux heures, et dans la nuit précédente la Toussaint. Quand vous avez besoin de ses secours contre l'esprit malin, lui, le démon malfaisant pour l' Eglise "l' Azrouant", vous sauve sous son manteau. Il vous secourt dans des dangers que, quelquefois, vous n'avez pas prévus, souvent, vous entendez, quand il vous enveloppe, passer avec un bruit affreux, le chariot de l'Ankou qui fuit à son aspect, qui s'éloigne en poussant des hurlements épouvantables, en sillonnant d'un long trait de lumière, l'air, la surface des marais en s'abîmant dans le sein de la terre, en disparaissant dans le Yeun... »

D’après le livre de Fanch Guillemin du Huelgoat « Les sorciers du bout du monde- 1988 ».Nos Teuss, et ils peuvent avoir à l'occasion des rapports sexuels féconds avec nous les humains, d'où pouvaient naître des géants ou des nains..Si donc les Teuss sont aussi des êtres mortels et périssables, comme il le semble bien, hélas ! il serait plus que temps d'intervenir pour en préserver l'espèce en voie d'extinction ; et il serait urgent d'organiser une société protectrice des Teuss, et de créer des réserves pour en protéger les derniers spécimens...